Retour à la case départ Plus qu'une simple partie de pêche, et un dénouement chanceux, c'est surtout une histoire d'émotions qui s'interfèrent, amitié, parole donnée, doutes et espoirs, mais surtout pas de renoncements.
Promesses Depuis 6 ans je me promet chaque année, de revenir sur les lieux de mon « nouveau départ » dans la pêche de la carpe, sur la Creuse, entre Vienne, Indre et Indre et Loire, une région magique, une rivière envoutante pour moi, parce que pleine de souvenirs, sans parler des amis que j’ai laissés là, après mon déménagement pour raisons professionnelles plus au Sud, vers Toulouse.
Et cette année, c’est décidé, je remonte pour quelques jours de pêche sur la Creuse.
Ce Dimanche 14 Avril, les nouvelles concernant le débit de la rivière sont plutôt mauvaises, avec les pluies de ces derniers jours, elle est en crue, son niveau est monté de plus d’un mètre, hors je dois partir de la Haute Garonne demain Lundi, le calcul est vite fait, la météo étant plutôt orienté vers le beau fixe, je sais par expérience que la rivière ne sera pas « pêchable » avant le Mercredi ou Jeudi suivant, soit la veille de mon retour programmé, cela me laisse au mieux, 24 heures pour faire ma pêche.
N’ayant pas d’autres jours de congés, je pourrais repousser cette pêche aux calendes Grecques, et aller sur le Lot, l’Aveyron, ou quelques barrages non loin de mon domicile, dans des lieux ou prendre du poisson est plus « abordable » en ce moment, remettre les amis à plus tard, mais non, une parole est une parole, et si la pêche doit en souffrir, ou être plus aléatoire, tant pis, je ferais avec, et puis l’envie de toucher ne serait-ce qu’une petite carpe de la Creuse, est aussi bien présente à mon esprit.
C’est décidé, quoi qu’il en soit, je remonte sur la Vienne.
Après deux ou trois coups de téléphone, pour confirmer mon arrivée imminente aux amis, le matériel est chargé dans la voiture, et aux aurores du Lundi je roule vers le Nord.
RetrouvaillesMa priorité en arrivant est de retrouver mes lieux de pêche préférés, voir s’ils n’ont pas trop changé en six ans, et ils sont identiques, bien sûr quelques arbres ont comme moi, pris de l’embonpoint, mais la rivière est la même.
RetrouvaillesJe me remémore mes pêche, ces fameux coups du soir, les séances d’amorçages, et surtout les émotions après la capture d’une carpe plus grosse ou plus jolie qu’à l’accoutumée. Prendre ne serait-ce qu’un poisson ici, suffirait amplement à faire mon bonheur, me ramènerais des années en arrière, et le niveau trop haut de la rivière ne m’empêchera pas de pêcher, enfin je l’espère.
Ensuite, place aux amis, ils doivent pour certains, avoir fini leur journée de travail, je peux donc aller leur rendre visite, non sans leur avoir passé un coup de téléphone.
Mais revenons à la pêche, la Creuse est très haute, trop même pour espérer y faire une pêche correcte, et je décide d’emblée d’amorcer deux postes.
En priorité, l’un de mes meilleurs postes de l’époque qui seras prévu pour ma dernière nuit, sachant que la décrue est amorcée, je mise sur le fait que pour la nuit de Jeudi à Vendredi, il sera exploitable, d’ailleurs, d’après les observations de Dominique Audigué, il faut généralement au moins 72 h d’amorçage pour que les carpes de rivières commencent à se polariser sur un poste et surtout un type d’appât, si les calculs sont bon, ça tombe bien, cela fera 72 heures pile poil
Jusqu’au Jeudi matin, je pêcherais un autre secteur, ou faire remonter les poissons est plus difficile, mais l’endroit me permet de surveiller en permanence, le poste prévu pour ma pêche du Jeudi soir.
Chaque matin, je replis mon abris et mon lit de camps vers 6 h, ne voulant pas laisser entrevoir que je pêche de nuit sur ce secteur, laissant croire aux passants, et autres pêcheurs, que j’arrive au levé du jour.
Entre brume et verdureVers 8h30 h, je remballe mon matériel pour aller amorcer le poste du Jeudi (appelons le ainsi, puisque c’est Jeudi que je veux le pêcher) puis, je reviens pêcher jusqu’en soirée, le poste d’attente, ce n’est qu’une fois la nuit tombée, que j’installe à nouveau, mon lit de camp et mon parapluie tente, répétant ceci tout les jours .
Question appâtsDurant cette pêche, le Mercredi soir, j’aurais le plaisir de voir Christophe Debenest qui œuvre pour la maison Mariykyu, il fera une petite pêche éclair, avec deux cannes courtes.
Une pêche ponctuée de succès, avec une petite commune d’environ 5 kg, prise avec un nouvel appât qui sortira en Juin de cette année dans le commerce, un appât assez bluffant, un maïs artificiel, bio dégradable, l’Aquacorn, qui semble t’il ne marche pas trop mal en cette période difficile.
Quoi qu’il en soit, je reste avec mes « bouillettes » cubiques, faite à base de nourriture à poussin 1er âge et de farine d’arachide.
J’amorce mon poste à raison de deux kilos chaque jour, répartis sur 10 m 2 environ gardant toute confiance dans ma stratégie, puisque je mise cette session sur la dernière nuit.
Fébrilité et doutesCela fait deux jours et demi que je suis ici, la rivière aujourd’hui, a presque retrouvé un niveau correct, en baissant de 60/70 cm, même si avec un niveau d’eau 20 cm plus bas, elle serait parfaite, je n’ai toujours pas vu un poisson, sur le poste d’attente ,et même après toutes ces années, si je ne suis plus à une journée près, l’impatience est là, il me vient à penser, « et si je faisais...capot »
La pensée de rentrer à la maison avec la frustration de n’avoir pas abouti cette pêche, de n’avoir pas revue une carpe de la Creuse était là.
Le gout du souvenirLe Jeudi soir arriva, le poste amorcé m’attendait, et enfin seulement j’aurais peut-être le bonheur de faire un bond en arrière, j’étais impatient d’en découdre avec ma rivière pleine de souvenirs, de lui en extirper au moins un, de le voir remonter en surface, comme accroché à ma ligne, j’étais là uniquement pour cela.
Franck et Yohann, devaient passer me voir ce soir là.
Yohann, un jeune avec qui j’avais échangé sur un forum de pêche, arriva le premier, je notais qu’il ferma la porte de sa voiture, sans occasionner le moindre bruit, prouvant par là une certaine délicatesse
Franck, arriva ensuite, sans faire de bruit, comme à son habitude.
Cela ne m’étonna guère, connaissant le loustic, un très bon pêcheur de sandre et de brochet, le faisant mal voir, par autant de jaloux, forcément moins capables.
De mon côté, je prépare mon matériel très sereinement, et comme pour me replonger 6 ans plus tôt, je monte mes lignes à l’identique, à savoir corps de ligne en 35/100ème, avec un bas de ligne en tresse de 15 lb d’une longueur de 60/70 cm, équipé d’un hameçon n°6, un plomb coulissant de 70gr avec une butée à environ 20 cm derrière.
Yohann me fait part de son étonnement sur la longueur des bas de ligne, je lui explique que cela éloigne un peu l’esche du plomb, et surtout donne plus de liberté à celle-ci, quant au poids des plombs, dans la mesure ou mes cannes sont orientées en diagonales vers l’aval, le corps de ligne n’offre pratiquement aucune résistance au courant, et limite également les vibrations possible ce qui permet également d’utiliser des plombs plus légers, tout en ayant un maintient correcte de la ligne en place.
Ceci indépendamment du fait qu’il est plus efficace (et agréable) de combattre le poisson avec un plomb de 70gr, qu’avec un plomb de 140 gr ou plus, surtout avec un corps de ligne en nylon de ce diamètre, je ne suis, non plus, pas loin de croire, qu'un plomb, moins il est lourd, plus il décolle du fonds lors d'un départ, et risque par conséquent, de moins se prendre dans des accrocs.
J’utilise ce type de montage lorsque je pêche une zone exempte d’obstacle, ou il ne sert à rien de brider le poisson plus qu’il ne faut, quant au choix du nombre de cannes, que je limite à deux, je suis convaincu que moins il y a de fil dans l’eau, mieux c’est.
Cela éveil moins la méfiance des poissons, génère probablement plus de touche et les risques d ‘emmêler les lignes lors d’un combat, sont moindre qu’avec trois ou à fortiori, quatre cannes, tout le monde y trouve sont compte, le poisson, moins dérangé par plus de lignes dans l’eau, et surtout le pêcheur.
Mes cannes sont donc orientées en diagonale vers l’aval, et les montages placés à une distance de 4 à 8 m du bord environ, un montage dans la zone calme, et un en limite du courant.
Il n’y a plus qu’à s’armer de patience, et ça tombe bien, il m’en reste encore un peu.
L’attente n’est pas longue, enfin un « premier départ » survient, hélas, comme toute erreur se paie comptant, j’avais par « facilité », utilisé un bas de ligne ayant déjà servi, et l’hameçon ne semblait pas être des plus piquant, le poisson, pas très gros (pour une fois), mais au moins aussi nerveux que moi, se décroche après quelques secondes de combat.
Instant de regret, je ne peux m’en prendre qu’à moi-même en remplaçant aussitôt ce bas de ligne par neuf.
Un deuxième départ se produisit, et là, après un combat de quelques minutes, je pouvais enfin mettre à l’épuisette une petite miroir d’environ 5 kg, un petit poisson certes, mais depuis six ans que je n’avais pas vu une habitante des lieux, la joie était là, ce pourquoi j’étais revenu se réalisait, des souvenirs me revenaient en bloc, j’étais heureux, tout simplement.
« Ça fait du bien de toucher du mucus » surtout après six ans d’attenteYohann, n’ayant pas pêché depuis le début de l’année, mis la main dessus en disant « ça fait du bien de toucher du mucus » il ne savait pas ô combien j’étais d’accord avec lui.
Quelques minutes plus tard, un autre poisson vint me faire l’aumône de sa capture, et quel poisson, une miroir grise, avec des écailles foncées, une pure merveille, une femelle pleine d’œufs, ce qui ne l’empêcha pas, lors du combat, de foncer rapidement vers le seul buisson qui se trouvait 25 à 30 m plus en aval, le long de la berge, je dût, pour éviter le pire, faire promptement 4 à 5 pas vers l’amont, afin de pouvoir rattraper l’élasticité du nylon, et ainsi brider le poisson correctement.
Le nylon à l’avantage d’être « élastique », et ainsi amortir plus facilement les rushes des poissons, surtout avec des montages relativement fins, mais cet avantage se retourne contre nous, surtout à des distances supérieures à 30 40 m environs, si l’élasticité du nylon utilisé est trop importante, et mal gérée lors du combat avec le poisson.
Un coefficient d’allongement ou d’élasticité serait le bienvenu sur les bobines de fil, pour nous permettre de mieux choisir le nylon servant au corps de ligne, puisque cette élasticité peut varier de 11 à 17 % selon les nylons.
Cadeau de la natureDéjà comblé, et pourtant …Je continuais ma pêche, non sans avoir envoyé un SMS à un ami, lui disant que ce pourquoi j’étais là, près de cette Creuse, était accompli, que j’étais déjà comblé, et que si je faisais d’autres poissons, cela serait des cadeaux de la rivière
Après le départ des deux invités, je restais là, calme, serein, presque détendu, en parfaite harmonie avec le lieu, savourant égoïstement le moment, puisque le pêcheur est égoïste par nature.
De l’épuisette au tapis, du triangle au rectangleCe n’est que plus tard que je toucherais un poisson qui me gratifiera d’un combat puissant.
Je mettrais, contre mon habitude, ce poissons dans mon unique sac, histoire de faire des photos de jour, et retournerais me coucher pour une attente de courte durée, puisque un autre poisson daignera me faire l’honneur d’un combat plutôt âpre, et ce n’est qu’au moment de lever l’épuisette hors de l’eau, que je prendrais conscience que celui-ci est plus massif.
En posant cette carpe sur le tapis de réception que j’utilisais déjà avant de migrer au Sud, j’eu une pensée pour ses ainées, venues 6 ans plus tôt y prendre la pause le temps d’une photo.
Ce poisson, comme les autres, je ne le pèserais pas, son poids importait peu, cette notion n’ayant pas sa place ici, pas ce soir en tout cas.
Je sortirais le poison mis précédemment au sac, ferais une photo comme je le fais d’habitude, c'est-à-dire sur le tapis, et lui rendrais sa liberté, momentanément accaparée par une pensée sur le côté négatif des pêcheurs de carpe que nous sommes, à vouloir faire de belles photos, à la lumière du jour, nous poussant à utiliser à tors et à travers les sacs de conservation, alors que parfois, l’émotion intacte quelque minutes après une prises, se capture mieux sur la photo
Je mettrais alors ce dernier poisson dans le sac libéré de sa place, le temps que Franck, à qui j’avais promis de l’appeler si je touchais un poisson plus gros, n’arrive pour l’admirer, ce qu’il fît moins de 10 minutes plus tard
Lorsqu’il le découvrit, il ne pût s’empêcher de rester quelques instants étonné par sa taille, il me fît quelques photographies, et le poisson repartis dans son élément
Ce poisson de 1,01m je l’ai déjà pris en 2004 il faisait 94 cmCe n’est qu’après le départ de Franck, que j’eu une autre touche, la pêche n’était pas fini.
Durant le combat, le poisson remontait le courant, venant toucher la ligne placée en amont, le son du détecteur me fît prendre conscience du danger, je réussis à faire redescendre le poisson de quelques mètres vers l’aval, mais le bruit du détecteur ne s’arrêtait pas, je cru un instant, mais un instant seulement, que les lignes étaient emmêlées avant de comprendre, que la carpe que je combattais, n’était pas venue manger seule, hélas, ce n’est qu’après avoir mis la carpe à l’épuisette, que je pût enfin prendre la deuxième canne en main, mais le poisson dans un remous rageur, se décrocha à environ 50 m en aval de mon poste de pêche, « on ne gagne pas à tout les coups ».
Je mis cette nouvelle prise au sac, non pas pour faire des photos, mais parce que Franck devait revenir en matinée, et je savais qu’il serait heureux de la voir, mais il ne vint pas, à cause d’un sommeil probablement trop chargé d’écailles.
Victime temporaire du tapis de verdureDurant cette matinée, je touchais un dernier poisson, une petite carpe cuir, concluant simplement une pêche plus qu’heureuse pour cette rivière, ou même si les poissons ne sont pas difficiles ils restent méfiants, car sauvages.
Ensuite, arriva le moment de replier le matériel, ranger mes nouveaux souvenirs, passer saluer une dernière fois mes amis, et redescendre vers le Sud.
Avant de partir, je laisserais quelques bouillettes à Franck et Yohann, afin qu’ils puissent éventuellement profiter des postes amorcés, et qui sait, au moment de mettre une carpe à l’épuisette, aient une petite pensé amicale pour moi.
Ils toucheront chacun un poisson de belle taille, Franck faisant même son plus gros poisson de rivière, tandis que Yohann fera un poisson de 19.5 pris 6 ans plus tôt trois biefs en amont
Une cuir, pour vous séduireConclusionsL’une de mes connaissances me fît remarquer, tout en me donnant des poids approximatifs pour chaque prise, que j’étais au bon endroit au bon moment.
Certes, il n’avait pas tort, la seule nuance étant que j’avais choisi et l’endroit et le moment, malgré des conditions peu évidentes , puisque n’ayant qu’un créneau d’une nuit pour la pêche, et puis, en ce qui me concerne, dans cette histoire, cette notion de poids des poissons n’a pas sa place, ce n’est pas cela que je cherchais là bas, seuls les souvenirs de cette improbable réussite, la joie d’avoir revu des amis, le plaisir de sensations vieilles de six ans retrouvées, de presque réapprendre la pêche, sont pour moi le plus important, pour le reste…..
On a tous un endroit chargé de souvenirs ou l’on souhaite revenir pêcher, et faire un retour aux sources, ou à la case "départs" lorsque tout se passe bien.
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